Quantcast
Channel: François de Siebenthal
Viewing all articles
Browse latest Browse all 2306

La force du sourire d’un bébé !

$
0
0


La force du sourire d’un bébé !

Les curés de paroisse sont un peu comme les médecins généralistes : ils voient toutes sortes de gens ! Un curé se souvient :

Quand ce soir-là, j’ai ouvert ma porte, je n’ai d’abord vu qu’un grand gaillard d’environ 1m 85, genre pilier de rugby, avec des yeux noirs et un beau collier de barbe. Puis sa femme, toute menue, avec un profil de madone et des yeux d’un bleu sombre.
Entrez tous les deux, leur dis-je
Tous les trois, rectifîa-t-il en riant. Et j’aperçus au bout de son bras, un de ces paniers berceaux qu’il déposa doucement à ses pieds. Il entrouvrit le sac et dit en confidence à son épouse :
Elle dort. Il posa ses grandes mains carrées sur ses genoux et murmura :
Alors, Marie-Pierre, tu racontes ?
Ah non ! André, tu avais accepté de le raconter toi-même ; c’est ton histoire après tout !

Il se mit à parler. Au début, il cherchait un peu ses mots et puis il parla comme une source qui jaillit. Il était orphelin, élevé par la DASS. II avait cravaché dur pour devenir ingénieur ; maintenant, il était chef de chantier sur autoroute. Il avait rencontré sa Marie-Pierre et il lui avait dit :
Pas de curé, pas de maire, et pour un bout de temps, pas d’enfant. Vu ? Elle avait accepté à regret. Quand elle lui annonça, un an plus tard, qu’elle était enceinte, ce fut le drame. D’une voix dure, il lui dit :
Bon, tu connais l’I.V.G., le plus tôt sera le mieux. C’est même remboursé par la Sécu. En la voyant hésitante, il ajouta :
De toute façon, c’est lui ou moi. Elle avait longtemps hésité. Mais un matin, elle lui avait dit :
Fais ce que tu veux, moi je le garde. Il était resté. Les mois suivants avaient été terribles. Elle redoutait, et lui désirait une fausse couche. Il avait voulu assister à l’accouchement qui l’avait bouleversé, moins par l’arrivée en ce monde de cette petite chose fripée et criarde, que par le mystère de ce que vivait celle qu’il aimait. Peu à peu, malgré tout, son coeur changeait.

C’est six mois plus tard que tout s’était joué. Ma femme m’a dit : Va voir si elle dort. Elle a toujours peur qu’elle s’arrête de respirer, ça arrive aux bébés. Nous laissons toujours une veilleuse près de son berceau. Je me suis assis et je l’ai regardée, et ça s’est mis à gamberger dans mon crâne. Je me disais : II y a un an, elle n’existait pas, et maintenant elle est là, si belle. D’où viens-tu, petite Claire ? Je me croyais athée mais je sais que ce n’est pas le hasard qui peut faire de tels miracles ! Et moi, maintenant, je t’ai sur les bras, qu’est-ce que je vais faire de toi ? Je sais construire des ponts et creuser des tunnels, mais élever un enfant ! Je m’aperçus soudain qu’elle avait ouvert les yeux. Elle me regardait avec des yeux immenses, un regard pénétrant. Il n’était pas sévère ce regard, mais sérieux ; il me traversait, me jugeait. Et je me suis dit : Si Marie-Pierre avait fait ce que je voulais, tu ne serais plus là, petite Claire ; comme si je t’avais étranglée avec mes mains. J’ai eu honte. Elle a alors bougé, tendu les bras vers moi. Je lui ai donné mon doigt qu’elle a attrapé de sa main minuscule. Elle serrait si fort que ses petits ongles étaient tout blancs. Elle me souriait. Et quelque chose a craqué en moi, comme un barrage qui cède. Elle venait de refermer les yeux. J’ai pleuré comme un môme, comme je n’avais pas pleuré depuis longtemps, de douleur, mais aussi de joie. Je me suis senti pardonné. Et j’ai dit le "Notre Père" une prière pour moi difficile, car mon père, je ne l’ai pas connu. Ma femme est arrivée à ce moment-là ; les femmes comprennent certaines choses sans qu’on leur explique. Je lui ai dit : Dis donc, chérie, j’ai une idée. Je me demande si ça serait bien qu’on la fasse baptiser cette môme ? Elle fut tout de suite d’accord. Dans la foulée j’ai ajouté :
Et j’ai une autre idée : puisqu’on aura un curé sous la main, je ne sais pas si tu serais d’accord, on pourrait peut-être lui demander de nous bricoler un petit mariage en même temps. Alors, elle m’a sauté au cou en me traitant de grand fou, et c’est pour ça qu’on est là.

Ils ont fait, quelque temps plus tard, un beau mariage et un beau baptême. Au moment des consentements, Claire s’est mise à gigoter entre les bras de sa marraine. Elle voulait être avec papa et maman, ce qui fût fait. Elle était donc entre eux quand ils se promirent fidélité et regarda, avec beaucoup de curiosité, sa maman passer l’anneau brillant dans le gros doigt de son papa, le même qu’elle avait tenu durant la fameuse nuit. Au fond, c’est elle qui lui avait mis la bague au doigt... Le sourire d’un bébé est le plus fort !

Source : www.labonnenouvelle.fr


Viewing all articles
Browse latest Browse all 2306

Trending Articles



<script src="https://jsc.adskeeper.com/r/s/rssing.com.1596347.js" async> </script>