Armageddon ou Armaguédon (de l'hébreu : הַר מְגִדֹּו / har M'giddo, transcrit Ἁρμαγεδών / Harmagedốn en grec), un petit mont en Galilée dans la région nord
Les États-Unis connaissent déjà la réponse à cette question grâce à cet homme: le lieutenant général Paul K. Van Riper. Il a mené l'Iran vers une victoire décisive dans une guerre fictive contre les forces américaines lors du plus grand exercice de simulation militaire de l'histoire des États-Unis.
Le Lt. Gen. Van Riper est un officier retraité du US Marine Corps et un vétéran du Vietnam et de l'opération Desert Storm. Toutefois, ce ne sont pas ces guerres qui l'ont rendu fameux. Van Riper s'est distingué suite à sa retraite pour son rôle dans le Millenium Challenge 2002, une simulation militaire de 250 millions de dollars.
Pour faire une histoire courte, le Millenium Challenge 2002 (MC02) était un important exercice de simulation militaire mené par les États-Unis. Se déroulant du 24 juillet au 15 août et coûtant quelques 250 millions $, MC02 consistait en des exercices réels et des simulations informatiques ayant pour but de devenir l'exercice de développement de concepts le plus grandiose, le plus dispendieux et le plus élaboré de l'histoire militaire américaine. Le Congrès lui avait confié le mandat « d'explorer les défis critiques du combat au niveau opérationnel d'une guerre à laquelle seraient confrontés les forces interarmées américaines après 2010 ».
Les adversaires de cette simulations étaient les « Bleus », représentant les États-Unis, et les « Rouges », représentant un « ennemi du Moyen-Orient » nul autre que l'Iran.
Les Rouges étaient menés par le lieutenant général Van Riper, qui adopta une stratégie asymétrique, utilisant entre autres des méthodes révolues afin d'échapper au réseau de surveillance sophistiqué des Bleus.
La simulation devait débuter avec un exercice d'entrée forcée des Bleus impliquant les 82nd Airborne et la 1st Marine Division.
Lorsque les Bleus ont lancé aux Rouges l'ultimatum de se rendre, Van Riper a décliné. Puisque la Doctrine Bush de l'époque comprenait des frappes préventives contre des ennemis potentiels, Van Riper savait que les Bleus allaient s'en prendre à lui — ce qu'ils ont effectivement fait.
Peu de temps après, 19 navires dont un porte-avions et quelques 20 000 membres des forces américaines se retrouvaient au fond du Golfe Persique, la guerre était terminée et le lieutenant général Van Riper était le grand vainqueur. L'exercice fut suspendu puis repris du début.
COMMENT EST-IL PARVENU À GAGNER?
Après l'exercice, Van Riper a expliqué que les Bleus étaient coincés par leur propre mentalité. Leur technologie bien supérieure comprenait des matrices de renseignement avancées et des évaluations opérationnelles (Operational Net Assessment) qui indiquaient où se situaient les vulnérabilités de l'OPFOR (la partie adverse) et prédisaient ce que Van Riper étaient le plus susceptible de faire parmi une gamme de scénarios possibles. Les Bleus dépendaient en grande partie là-dessus. Lorsqu'ils se sont attaqués aux tours à micro-ondes des Rouges et à leur fibre optique, ils s'attendaient à ce que les forces de Van Riper pallient au problème en utilisant des satellites et des téléphones cellulaires pour communiquer, devenant ainsi faciles à épier.
Mais ce ne fut pas le cas. Van Riper a plutôt utilisé des courriers à motocyclette, des messages cachés dans les prières et même des système d'éclairage codés sur ses pistes d'atterrissage pour communiquer — des méthodes ayant fait leurs preuves lors de la Seconde Guerre Mondiale. « J'ai frappé en premier », a-t-il dit lors d'une entrevue pour Blink: The Power of Thinking Without Thinking, écrit par Gladwell en 2005. « Nous avons calculé exactement combien de missiles cruise leurs navires pouvaient tolérer, et nous en avons simplement lancé un nombre supérieur. »
Dès que les forces navales des Bleus se trouvèrent au-delà du point de non retour, il a frappé — et il a frappé dur. Des missiles provenant d'unités terrestres, de bateaux civils, puis d'avions en basse altitude ont surgit vers la flotte tandis que des bateaux rapides bourrés d'explosifs lançaient des attaques suicides pour décimer les Bleus. Le signal de Van Riper pour initier l'attaque a été diffusé en message codé par les minarets des mosquées au début de l'appel à la prière.
En fait, Van Riper détestait le processus de prise de décision analytique des Bleus. Il a trouvé qu'ils y consacraient bien trop de temps. Son plan pour leur résister comprenait des moyens permettant à ses équipes de prendre des décisions en un clin d'oeil, ainsi que des moyens communications analogues mais fiables.
Comme je l'ai mentionné, l'exercice a été suspendu puis relancé du début suite au résultat initial, les navires des Bleus ont été « remis à flot » puis les règles d'engagement ont été modifiées. Plus tard, le général Peter Pace qui menait les Bleus a tenté de justifier ainsi cette décision : « Soit vous me tuez dès le premier jour et je reste ici à ne rien faire pour 13 jours, soit vous me remettez en vie et vous avez 13 jours de plus pour expérimenter avec moi. Quelle est la meilleure façon de faire? »
Après que l'exercice ait été réinitié, les participants ont été forcés de suivre un script assurant la victoire des Bleus. Parmi d'autres règles que ce script imposait, les Rouges devaient impérativement mettre en marche leurs radars antiaériens afin qu'ils soient détectés et détruits, et ils n'avaient pas le droit de neutraliser les avions qui amenaient les troupes des Bleus sur leur territoire.
Van Riper soutient également que les officiels lui ont refusé l'opportunité d'employer ses propres tactiques contre les Bleus, et qu'ils ont ordonné aux Rouges de ne pas utiliser certaines armes contre les Bleus, obligeant même les Rouges à dévoiler la position de leurs unités.
À cause de ces changements, Van Riper a abandonné l'exercice et a expliqué plus tard que les généraux américains avaient altéré le but de MC02 afin de renforcer la doctrine existante et la notion d'infaillibilité des forces américaines plutôt que de tirer une leçon de cette expérience.
En rétrospective
De nombreux citoyens américains ne savent rien de cet incident, même après qu'il ait fuité dans les médias (voir l'article du New York Times How We Won the War). Le fait que les États-Unis aient truqué leur exercice militaire afin de convenir à leur doctrine et pour assurer une victoire américaine sur papier plutôt que d'en tirer des leçons et de développer de nouvelles stratégies devrait inquiéter les Américains. Le général Van Riper disait ceci: « Une culture qui n'a pas la volonté de réfléchir profondément et de se remettre en question n'a pas un avenir brillant devant elle ».
Pour en savoir plus à ce sujet (NDT: liens en anglais) :
L'Iran sait tout cela et a développé une stratégie de guerre asymétrique afin d'exploiter les failles et l'inflexibilité des Américains. Étonnamment, c'est l'Iran qui tire des leçons de cet exercice militaire de 250 millions $ payé par les contribuables américains. N'oubliez pas que MC02 s'est déroulé il y a 17 ans et que, depuis, l'Iran a :
- grossit son arsenal de missiles cruise et de missiles balistiques anti-navires, au point de surclasser les forces américaines de l'exercice MC02;
- construit une quantité énorme de très petits navires d'attaque. Même si certains Américains s'en moquent complètement, ils représentent néanmoins une solution asymétrique;
- évité la puissance de la force aérienne américaine grâce à une défense antiaérienne adéquate et en profitant du terrain. Voir How did Iran shoot down America's most advanced spy drone? Doesn't Iran lack such technology? (NDT: lien en anglais);
- pallié à une autre force des Américains, soit la technologie et l'électronique, en utilisant plutôt des vieilles tactiques oubliées de communications et de commandement, telles qu'employées lors du MC02;
- créé de nombreux districts navals décentralisés et indépendants qui servent à lancer des attaques par bateau. Ce document (en anglais)explique la guerre navale asymétrique de l'Iran.
Maintenant, si vous me demandez « Est-ce que les États-Unis gagneraient une guerre contre l'Iran ? », je vous répondrais que les États-Unis connaissent déjà la réponse et qu'ils décident simplement de l'ignorer. D'autres facteurs tels que le terrain, le vaste territoire, et le fait qu'une attaque contre l'Iran pourrait rassembler sa population déjà homogène ne font qu'ajouter au problème.
N'oubliez pas: la guerre, c'est l'enfer.
David Lepage, passionné de géopolitique et d'actualité internationale
Traducteur ·Traduit mercredi · Vote positif par Joe Smoke, lieu : Les États-Unis d'Amérique (1984-présent)
Mahdi Yassine
Auteur originalCette réponse peut ne pas être une traduction fidèle de la réponse de Mahdi Yassine à Quora en anglais : Can the US win a war with Iran if a war stays non nuclear?